Comment moduler favorablement son microbiote intestinal avec des fibres prébiotiques tout en se régalant, en cuisinant local et de saison ? C’est ce à quoi vous invitent deux chercheuses de l’UCLouvain, Nathalie Delzenne et Audrey Neyrinck, dans un livre de 50 recettes prébiotiques.
Vous avez dit « prébiotique » ? Voilà un terme qui, s’il parle aux initiés, n’est pas très ragoutant aux yeux du grand public. Pourtant, l’effet prébiotique est au cœur de nombreux bienfaits attribués aux fibres alimentaires fermentescibles. Nous avons rencontré la professeure Nathalie Delzenne (Faculté de pharmacie et sciences biomédicales à l’UCLouvain), co-autrice de ce nouveau livre. « Le monde des prébiotique est loin des préoccupations de tout le monde. C’est une science complexe, jeune. Le but de ce livre, c’est de montrer que l’on peut avoir un réel impact sur son microbiote intestinal via l’alimentation, avec des végétaux cultivés pas très loin de chez nous. Oui, bon nombre de légumes racines, de légumes oubliés, ont cette vertu de changer le microbiote intestinal, et de participer ainsi à la santé, aux côtés des autres recommandations alimentaires ».
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Faire évoluer les recommandations sur les fibres alimentaires
Cette nouvelle publication concrétise 30 années de recherches des scientifiques de l’UCLouvain sur la modulation du microbiote intestinal par les prébiotiques. Il ne s’agit pas simplement de recettes riches en fibres, mais bien en fibres prébiotiques. D’ailleurs, souligne la chercheuse, les recommandations concernant les fibres alimentaires devraient évoluer pour ne pas se limiter à une quantité totale de fibres alimentaires, sans autre distinction. Sur les 30 g de fibres alimentaires actuellement recommandées pour bénéficier d’effets intéressants pour la santé, elle estime que les 2/3 devraient être couverts par des fibres fermentescibles. Mêmes limites pour les tables de composition des aliments qui, pour l’heure, ne mentionnent que la teneur en fibres alimentaires totales. « Nous travaillons sur une base de données, qui sera en libre accès et renseignera sur la teneur en fibres fermentescibles des aliments », poursuit Nathalie Delzenne.
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La tolérance intestinale, ça se cultive !
Les fibres fermentescibles prébiotiques génèrent inévitablement des gaz dans le côlon. Si ce processus est parfaitement naturel, il peut aussi incommoder les personnes sensibles. D’ailleurs, dans certaines situations, on cherche à limiter autant que possible ce type de fibres, dans les régimes pauvres en FODMAP. Mais attention, précise la chercheuse, si la suppression des FODPAP peut avoir une utilité chez certaines personnes, elle ne doit certainement pas être une norme. La suppression doit être transitoire, l’objectif étant de réintroduire progressivement le plus d’aliments possibles, pour ne pas se priver des effets bénéfiques des fibres prébiotiques. L’éviction de va pas aider à guérir, que du contraire !
La tolérance gastro-intestinale aux fibres prébiotiques est quelque chose qui s’acquiert, explique Nathalie Delzenne. « Nous avons constaté dans nos études humaines qui si les borborygmes et autres gargouillements intestinaux subsistent après deux semaines d’une alimentation riche en fibres prébiotiques, les autres symptômes gastro-intestinaux s’améliorent. Le microbiote intestinal s’adapte, il faut juste lui laisser un peu de temps. C’est la raison pour laquelle il vaut mieux commencer avec de petites doses de fibres fermentescibles, et augmenter progressivement ».
Lapin et gratin de topinambours au curry, poireaux à la marinière, ragoût de veau aux salsifis, pain de viande accompagné d’artichauts et de patates douces, oignons rouges farcis… Les 50 recettes ont été élaborées en collaboration avec quatre étudiant·es en diététique de la Haute Ecole Léonard de Vinci. « Nous voulions sortir de l’aspect scientifique et aider les gens à trouver un équilibre alimentaire. Notons que les recettes ont accompagnées d’un « prébio-score », qu’elles ont toutes un Nutri-Score A ou B, et qu’elles sont parfaitement en phase avec l’Epi alimentaire codéveloppé par Food in Action et le Conseil Supérieur de la Santé.
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