A l’approche des beaux jours, les conseils détox et autres ‘opération bikini’ rabâchés dans les médias rappellent de se débarrasser des graisses excédentaires accumulées. Mais quel mécanisme de (re)mise en condition physique à long terme conseiller à vos patients?
« Un muscle qui bouge, n’est pas qu’un muscle qui bouge », se plait à rappeler Jean Sadouni, Master Trainer. Lorsqu’il se met en mouvement, le corps perçoit cette mise en route comme un stress auquel il doit répondre. Il déclenche une série de réactions neurohormonales: l’adrénaline, la noradrénaline et ensuite l’hormone de croissance (GH) et le cortisol se produisent et s’élèvent.
Ces effets pulsatiles se produisent dans le but d’adapter le corps à l’effort et au stress provoqué, ce qui déclenche un appel d’énergie au niveau du glycogène (musculaire et hépatique), des tissus adipeux et de la cellule musculaire (pour ce qui est des triglycérides). Les acides gras libres (AGL) mobilisés vont rejoindre, par la circulation sanguine, la cellule musculaire pour produire de l’énergie.
On assiste ensuite à un mécanisme de catabolisme des graisses stockées dans le tissu adipeux. Les acides gras vont rejoindre la cellule musculaire pour être utilisés en énergie, et le glycérol rejoint le foie pour produire du glucose. La réponse neuro-hormonale face à l’effort implique, entre autres, un appel d’énergie par l’intermédiaire du glucose et de la mobilisation des graisses.
Optimiser le système pour éliminer
L’organisation de l’activité physique permet d’optimiser cette réponse hormonale et la mobilisation des graisses. Le cerveau s’adapte au stress auquel il est confronté. C’est l’intensité de l’effort sous forme d’intervalles qui va permettre ce travail, favorisant une combustion des graisses de façon continue.
Pendant l’effort, le corps est mobilisé, mais les effets positifs de l’activité physique se prolongent après, dans la vie quotidienne, lorsque le corps au repos s’adapte et apprend à mieux mobiliser les graisses, même entre les repas. Le système de demande d’énergie optimisé s’avère plus performant: la cellule est devenue beaucoup plus sensible et réceptive à la libération des graisses.
Brûler des graisses par intervalles
Ces dernières années, de nombreuses recherches ont été menées dans le but d’optimiser l’activité physique et on sait aujourd’hui que c’est l’intensité de l’effort qui compte. L’entraînement par intervalles, appelé aussi entraînement fractionné (EF) ou interval training, s’avère le plus efficace, la combustion des graisses étant plus grande.
Il consiste à accroître les dépenses, en augmentant l’intensité dans l’intervalle. On travaille par exemple avec des cycles d’une minute d’effort suivie de trois minutes de récupération, et ainsi de suite, ce qui a prouvé une meilleure efficacité que l’effort sans interruption. Un autre exemple consiste à courir ou à marcher durant 20 minutes et d’y intégrer 2 accélérations.
A cette activité périodisée, on ajoute bien sûr 10 minutes d’échauffement et 10 minutes de cool down. Après ce type d’entraînement, le corps reste pendant 38 heures en accélération métabolique. C’est à ce moment-là qu’a lieu le plus souvent la combustion des graisses.
Trenblay et ses collègues ont en effet comparé la combustion des graisses d’un groupe de sportifs qui a pratiqué 20 semaines d’entraînement en endurance, et d’un autre groupe qui s’est entraîné par intervalles durant 15 semaines. Ils ont constaté que le coût énergétique du groupe endurance était plus élevé que celui du groupe d’entraînement fractionné (28.661 kcal versus 13.614 kcal). Par contre, ceux qui ont pratiqué l’entraînement fractionné ont brûlé 9 fois plus de graisses!
Une autre étude menée à l’Université de Sydney pendant 15 jours d’entraînement prouve l’efficacité des intervalles. L’entraînement sous forme de cycle de sprint pendant 8 secondes avec 12 secondes de récupération a démontré davantage d’efficacité dans la combustion des graisses, que la même quantité de travail effectué en continu à faible intensité.
Fractionner pour rompre avec la monotonie
L’avantage de l’entraînement fractionné, c’est qu’il n’y a pas d’endormissement du système hormonal et d’adaptation physiologique, qui doit continuellement faire face à l’effort du fait des changements et des pics d’intensité. Le cerveau est un système intégré qui va toujours faire en sorte de minimiser les risques et d’optimiser les récompenses, c’est la loi de la survie. Le corps va tout faire pour s’habituer en diminuant l’effort et le stress ressenti.
Varier les exercices lors d’un même entraînement est une façon de jouer sur l’intensité, le corps doit systématiquement amplifier sa réponse. Il reste sur le qui-vive. L’intensité n’est donc pas qu’une question de vitesse de l’exercice ou de charge de l’effort. Deux à trois entraînements fractionnés par semaine apportent davantage de résultats à long terme qu’un entraînement frénétique avec la même régularité.
Le plus difficile dans la remise en forme est d’intégrer l’activité physique dans son quotidien, il ne faut donc pas nécessairement que l’activité soit trop longue pour être efficace. 45 minutes d’entraînement sont suffisantes, soit 10 minutes d’échauffement, 25 minutes d’effort sous forme d’intervalles et 10 minutes de cool down. Le mieux est donc qu’elle se pratique sur du long terme. Et l’interval training apporte en peu de temps des effets physiologiques beaucoup plus intéressants. Ce n’est pas la durée mais l’intensité bien menée qui compte.
Il faut bien sûr tenir compte du profil, de l’état de forme et de l’état de santé du patient. Mais cette périodisation ne doit pas nécessairement être de forte intensité, elle peut s’appliquer à la marche, par exemple. Tant que l’on rompt avec la monotonie…
Il importe de garder à l’esprit deux principes fondamentaux: la planification ou périodisation de l’entraînement d’une part, et la récupération d’autre part. L’effort doit être progressif et périodisé, sans être maintenu trop longtemps à une trop haute intensité! C’est physiologique, c’est pour cela que ça fonctionne très bien.
Enfin, il s’agit de viser le résultat à long terme, soit le résultat d’une adaptation à l’effort que le corps peut supporter et qu’il peut progressivement mettre en place, durablement. En tant que professionnel, il vaut mieux offrir des conseils applicables à long terme pour remplir des objectifs tenables.