
Quelle alimentation adopter au quotidien pour contenir les phénomènes inflammatoires ? Nous avons rencontré la diététicienne-nutritionniste Sophie Janvier, qui s’est spécialisée dans l’alimentation anti-inflammatoire et nous partage sa vision.
L’alimentation anti-inflammatoire, c’est une sorte d’alimentation méditerranéenne 2.0 . Elle repose certes sur des principes ancestraux, mais avec une vision plus contemporaine, qui intègre notamment des sujets tels que les aliments ultra-transformés, l’intolérance au gluten et au lactose et la qualité du microbiote. « Une alimentation méditerranéenne au goût du jour en somme », nous livre Sophie Janvier, diététicienne, qui a notamment développé un programme en ligne autour de l’alimentation anti-inflammatoire appelé BOOST.
« Cette alimentation anti-inflammatoire n’est pas un remède miracle, cadre Sophie Janvier, mais elle peut s’avérer très utile pour préserver sa santé et lutter contre l’inflammation chronique. » Elle repose sur trois grands piliers :
1er pilier : les antioxydants
Les antioxydants tels que les composés phénoliques et les caroténoïdes limitent le stress oxydatif, un phénomène très en lien avec l’inflammation. Les polyphénols agissent aussi sur l’inflammation par l’intermédiaire du microbiote intestinal. De nombreux antioxydants sont des pigments colorés, alors place aux couleurs dans l’assiette, comme le propose Sophie Janvier dans le premier chapitre de son livre. On les retrouve notamment dans les fruits et légumes (surtout colorés), les épices, le thé, le café, le cacao, l’huile d’olive etc.
2e pilier : les fibres & le microbiote
Les fibres, plus précisément les fibres fermentescibles (souvent les fibres solubles), constituent le carburant du microbiote intestinal. Or, un microbiote intestinal en pleine forme assure une production substantielle d’acides gras à chaîne courte (propionate, butyrate…) aux effets anti-inflammatoires. Le microbiote intestinal contribue à maintenir sous contrôle la perméabilité de la muqueuse intestinale qui, lorsqu’elle est trop grande, laisse passer des composés tels que le lipopolysaccharide (LPS), une endotoxine qui agit comme un puissant déclencheur de l’inflammation. Légumes, fruits, céréales complètes (en particulier avoine et orge), légumineuses et graines contribuent à cet apport en fibres fermentescibles.
3e pilier : les acides gras anti-inflammatoires
Les acides gras aux propriétés anti-inflammatoires sont les oméga-3. D’une part, il y a l’acide alpha-linolénique (ALA) que l’on trouve dans des huiles végétales telles que les huiles de colza, lin, noix et cameline ainsi que dans les graines de lin et de chia. Il ne faut pas négliger l’apport en oméga-3 à longue chaîne que sont le EPA et le DHA. En effet, bien que l’organisme puisse les synthétiser à partir de l’ALA, cette conversion est très limitée, ce qui rend nécessaire un apport exogène en EPA et DHA. D’où l’intérêt de consommer des poissons gras tels que thon, saumon, sardine, hareng etc. Mieux vaut cependant se limiter à une fois par semaine pour les poissons gras, en raison des contaminants (métaux lourds surtout) et varier la taille des poissons (les petits poissons semblent moins pollués). Pour les personnes qui adoptent un régime végétarien ou végan, le DHA peut être obtenu sous forme de compléments alimentaires réalisés à partir de certaines microalgues telles que le Schyzochytrium ou Crypthecodinium.
Surconsommation et modes de cuisson
L’alimentation anti-inflammatoire consiste aussi à limiter les conditions qui favorisent l’inflammation. D’où l’intérêt d’éviter la prise de poids, car le tissu graisseux sécrète des molécules pro-inflammatoires. Il s’agit aussi de limiter le sucre, le sel, les acides gras saturés et les acides gras trans et d’éviter une consommation excessive d’acides gras oméga-6.
Certains additifs retrouvés dans les aliments ultra-transformés sont aussi dans le collimateur. C’est notamment le cas du polysorbate et des carraghénanes, qui ont été associés à une augmentation de la perméabilité intestinale et à l’inflammation. On évitera aussi de chauffer des aliments dans des contenants en plastique pour limiter le risque de migration de perturbateurs endocriniens.
Les modes de cuisson peuvent aussi s’avérer problématiques, dans la mesure où les hautes températures génèrent des substances pro-inflammatoires par l’intermédiaire de réactions de Maillard et de caramélisation. Mieux vaut donc garder la température sous contrôle et favoriser des cuissons douces (à la vapeur ou à l’eau, plats mijotés, cocottes au four etc.) ou au four sans dépasser les 160 °C.
Gluten & produits laitiers
On entend assez souvent dire que les produits laitiers favorisent l’inflammation, mais à date, il n’y a pas d’étude convaincante qui soutient cette assertion. En dehors d’une intolérance, il n’y a pas lieu de restreindre les produits laitiers, qui peuvent parfaitement être consommés à raison d’environ 2 portions par jour. Priorité aux produits laitiers fermentés tels que le yaourt et les fromages, plutôt qu’au lait. En cas de maladie inflammatoire avérée, il peut être utile de s’orienter vers des produits laitiers de chèvre et/ou de brebis, dont la caséine semble dotée d’un potentiel légèrement moins pro-inflammatoire que celle du lait de vache.
Pour le gluten, la gliadine peut avoir des effets pro-inflammatoires et favoriser le passage d’endotoxines au travers de la muqueuse intestinale. Sophie Janvier propose aux personnes atteintes de maladies inflammatoires de l’intestin ou d’endométriose, chez qui l’alimentation anti-inflammatoire peut s’avérer utile, de tester un mois sans gluten, et puis, selon l’amélioration, de discuter de la suite.
Une version marketing de l’alimentation méditerranéenne ?
« On me dit parfois que ce que je propose est une version marketing de l’alimentation méditerranéenne », note Sophie Janvier. « Et pourquoi pas ? Pourquoi ne pas utiliser le marketing pour rendre des objectifs alimentaires plus attrayants ? Il importe de faire comprendre que cette alimentation n’est pas inaccessible, qu’il ne faut pas avoir peur de la tester. Elle ne présente pas de risque (de déficience…), il ne s’agit pas d’un régime bizarre, c’est finalement une alimentation qui convient à tout le monde, ou presque ! Alors, allons-y pour la méthode de petits pas, comme je l’explique dans mon livre « La méthode douce pour mieux manger ». »
Plus d’information sur les formations de Sophie Janvier :
https://formation.sophiejanviernutritionniste.com/
Référence :
- La Méthode douce pour mieux manger, « 33 micro-changements pour rééquilibrer votre alimentation sans vous priver” (éditions Leduc).