Ennemies désignées, les graisses (surtout les saturées) sont traquées depuis des décennies, peut-être à tort… C’est en tout cas ce que suggère une vaste étude menée dans 18 pays, qui bouscule le discours classique.
Manger moins gras, et particulièrement moins d’acides gras saturés, représente une des recommandations phares de la nutrition actuelle, en particulier aux États-Unis et en Europe. Avec pour conséquence que la part des glucides, dont les amidons et sucres raffinés, qui s’en trouve renforcée.
Pourtant, cette sacro-sainte règle se voit de plus en plus mise à mal par des recherches récentes, même si cela ne suffit pas à modifier les recommandations actuelles. Mais cette nouvelle étude, qui porte sur plus de 135.000 personnes âgées de 35 à 70 ans, issues de 18 pays avec un suivi moyen de 7,4 ans, apporte de sérieux arguments en faveur d’une évolution du discours nutritionnel.
Les graisses associées à une mortalité plus basse
Cette étude appelée PURE, pour Prospective Urban Rural Epidemiology, représente pour l’heure la plus importante étude épidémiologique évaluant, dans des populations à revenus faibles et moyens, les associations entre:
- la consommation de macronutriments,
- les maladies cardiovasculaires,
- la mortalité.
L’équipe de PURE, qui comporte plus de 200 chercheurs, rapporte dans le Lancet des résultats qui vont à contre-courant de ce qui est communément admis: des apports élevés en graisses, y compris en acides gras saturés, mono-insaturés et polyinsaturés, ainsi qu’en protéines animales, sont chacun associés à une mortalité réduite, alors que les apports en glucides sont associés à une augmentation de la mortalité.
Pour les auteurs, des apports en lipides d’environ 35% de l’énergie sont préférables à une limitation des apports lipidiques sous les 30% de l’énergie.
Pas de conclusions hâtives
Ces résultats qui peuvent paraître surprenants doivent cependant être resitués dans leur contexte. En effet, ils ne concernent pas seulement – contrairement à la plupart des études américaines et européennes – des populations exposées à une abondance alimentaire, mais aussi des populations dénutries, pour lesquelles les objectifs nutritionnels ne sont pas les mêmes.
Se pose également la question du type de glucides dont l’apport élevé est associé à une augmentation de la mortalité. Car dans une autre étude basée sur PURE et publiée simultanément, les chercheurs rapportent que la consommation de fruits, de légumineuses et de crudités est associée à une mortalité plus faible.
Ces nouvelles données interpellent, mais elles n’apportent certainement de réponse finale à ce sujet controversé.