L’alimentation et le sport sont plus que jamais étroitement liés. L’un est un élément déterminant de la performance. L’autre joue probablement ce rôle tant espéré dans l’adoption d’une alimentation saine et d’un poids de forme. Et les deux font désormais l’objet de recherches intensives pour clarifier leur synergie d’actions.
Plusieurs études suggèrent que les performances physiques n’ont eu de cesse de s’améliorer au cours de ces dernières années. Des chercheurs INSERM de l’Université de Bourgogne1 ont récemment analysé les performances des meilleurs marathoniens de plus de 65 ans et marathoniennes de plus de 45 ans du marathon de New York entre 1980 et 2009. Les temps ont nettement diminué pour les catégories d’âge supérieures: sur un chrono moyen réalisé sur marathon de 3h50, les hommes de la catégorie 65-69 ans ont par exemple gagné 8 minutes entre les années 1980 et 1990 et 7 min entre les années 1990 et 2000. De même, pour les femmes, la moyenne des temps a diminué significativement dans les catégories d’âge supérieures à 45-49 ans.
Une évolution dans les comportements
Pour les chercheurs français, l’amélioration des performances peut s’expliquer par l’augmentation du nombre de participants observé dans ces catégories d’âge, de prime abord. Mais, elle s’explique aussi par l’intérêt croissant que porte cette population aux bénéfices de l’activité physique pour sa santé et son bien-être. Le désir de bien vieillir inciterait-il donc les seniors et les plus de 40 ans à faire plus de sport ? La question reste entière. Mais plusieurs interactions entre l’alimentation et le sport peuvent aussi expliquer ce phénomène, qui peut toucher d’autres tranches spécifiques de la population: les personnes qui souhaitent maigrir.
Si le débat est longtemps resté ouvert, une nouvelle étude bibliographique de l’Université de Harvard2 indique que toute augmentation de l’activité physique serait associée à une amélioration de l’alimentation et, au final, du poids. Les chercheurs expliquent que l’exercice régulier modifierait le fonctionnement et certains éléments structurels du cerveau (notamment la matière grise et des connexions préfrontales). Le principal résultat à long terme serait un renforcement du contrôle de l’inhibition à l’égard de comportements compulsifs, en particulier sur le plan alimentaire. Les chercheurs citent un exemple pour étayer ce phénomène: lorsqu’on ajoute l’exercice à un régime alimentaire amaigrissant, le traitement de l’obésité donne de meilleurs résultats, sachant que le patient suit son régime avec davantage de compliance.
L’obésité en point de mire
La piste de la lutte contre l’obésité est même à prendre au sérieux, au regard d’une nouvelle étude américaine publiée dans la revue Nature3. Cette équipe de scientifiques est parvenue à isoler une protéine messagère, intitulée irisine (ou PGC1-alpha), dans les cellules musculaires humaines. Principale particularité: elle serait produite après l’activité physique (après des séances répétées d’exercice prolongé) et aurait des effets hormonaux puissants, observés expérimentalement.
D’après les chercheurs, lorsque les niveaux d’irisine augmentent grâce à l’exercice, ils activeraient des gènes qui transforment la graisse blanche en «bonne» graisse brune. Un effet bénéfique, car la graisse brune brûle les calories en excès et offre donc de nombreuses possibilités thérapeutiques.
En outre, l’irisine améliore la tolérance au glucose, comme le démontre des tests effectués chez des rongeurs obèses et prédiabétiques. Une autre étude menée chez la rate enceinte cette fois, soutient également l’hypothèse d’une action combinée activité physique/alimentation, sur les troubles métaboliques associés à l’obésité4. Dans ce modèle expérimental, les auteurs ont constaté que l’exercice physique, associé à l’alimentation, diminuait significativement les dépôts graisseux, les lipides sanguins, la pression artérielle et l’insulinorésistance dans la génération suivante.
Sport et hydratation: la parole à l’expert
L’hydratation est un facteur important dans la réalisation et/ou le maintien de la performance. Pour Ria Vanderstraeten, diététicienne du sport certifiée, certaines recommandations sont nécessaires dans la prise en charge d’un patient sportif, quel que soit son âge.
– Boire avant, pendant et après l’exercice est un véritable apprentissage.
– Les enfants et les personnes âgées ressentent moins bien la soif et doivent donc être particulièrement surveillés et éduqués pour prévenir la déshydratation.
– À côté de la recommandation quotidienne de 1,5 litre d’eau, il est important de sensibiliser les patients à la compensation des pertes hydriques associées à l’effort physique.
– Avant l’effort, l’idéal est de boire 250 ml. Au cours de l’exercice, il est préférable de boire ce même volume toutes les 15 à 20 minutes.
– Lorsque l’effort dure moins de 60 minutes, l’eau constitue la boisson idéale. Lorsque l’effort perdure au-delà de 60 minutes, les boissons sportives sont recommandées. Après l’effort, l’important est de calmer la soif et de boire ensuite 6-8 gorgées supplémentaires.
– La boisson sportive optimale a bon goût, un pH neutre, est isotonique ou légèrement hypotonique (250 à 320 mosmol/litre), contient 4-8 g de glucides et 10-30 mmol de sodium par litre.
– Pour les sports de forte intensité, il est recommandé d’ingérer 60 g de glucides par heure et de prendre une boisson de récupération après l’effort. Si l’effort génère beaucoup de sudation et donc de perte de sodium, l’idéal est d’opter pour une boisson de réhydratation isotonique (+/- 320 mosmol/litre) et qui comporte 60-90 mmol Na/litre. Le lait écrémé est une bonne boisson de réhydratation, alors que le lait chocolaté écrémé est plutôt une bonne boisson de récupération.
– Pendant la grossesse, il est recommandé de boire beaucoup de liquides et de prévoir un habillement léger pendant l’exercice, car une température du corps supérieure à 38°C interfère avec la croissance du fœtus.
Protéines et performances
Si l’on s’intéresse cette fois aux facteurs nutritionnels influençant les performances physiques, certains experts plaident aujourd’hui pour une meilleure valorisation des apports en protéines. A l’occasion d’un colloque scientifique organisé par le CERIN à Toulouse en juin 2011, le sujet a été traité par le Prof. Xavier Bigard (Directeur scientifique de l’Institut de recherche biomédicale des armées, Grenoble)5. Selon ce spécialiste, la fin de l’exercice correspond à une augmentation rapide et intense des synthèses protéiques, alors que le flux de protéolyse continue à croître jusqu’à 3h après l’arrêt de l’exercice, pour diminuer 2 à 3 heures après la fin de l’exercice. La cinétique du métabolisme protéique est donc perturbée par la pratique d’un exercice soit endurant, soit surtout de force.
D’une façon générale, on considère que pour les sportifs d’endurance de loisir, les besoins et les apports conseillés en protéines ne diffèrent pas notablement de ceux de la population générale, dès lors que le besoin énergétique lié à l’effort est bien couvert. Chez des sujets régulièrement entraînés, par contre, une consommation de 0,86 g/kg par jour de protéines est associée à un bilan azoté négatif. Ainsi, si l’entraînement consiste en 4 à 5 jours par semaine pendant une heure au moins, l’augmentation du besoin semblerait n’être que de 20 à 25%, comparativement à la population sédentaire, soit 1,1 g/kg par jour. Chez les sportifs de haut niveau, l’apport nutritionnel conseillé a été estimé à 1,6 g.kg-1.j-1. Le moment d’ingestion crucial est la phase de récupération, pendant laquelle il faudra une parfaite disponibilité en acides aminés pour assurer la reconstruction du muscle.
Selon le Prof. Bigard, il est donc nécessaire d’envisager un apport protéiné dans la phase de récupération précoce, au même titre qu’une réhydratation optimale, associée à un apport glucidique suffisant.
Sources:
1. Lepers et al., Age (Dordr), 2011 May 27.
2. Joseph R.J. et al., Obes Rev., 2011 Oct, 12(10): 800-12. Epub 2011 Jun 16.
3. Boström P. et al., Nature, 2012.
4. Rajiaa S. et al., Nutrition, Metabolism and Cardiovascular Diseases, Online 2 February 2012.
5. Colloque CERIN, «Protéines et activité sportive: pourquoi et comment?», Toulouse, juin 2011.