Un meilleur équilibre entre protéines animales et végétales a bien des avantages nutritionnels. Des nuances s’imposent cependant sur le rapport entre les deux sources…
Une consommation élevée de protéines animales semble favoriser le développement à long terme de plusieurs pathologies. L’association établie entre le cancer colorectal et une consommation élevée de viande rouge et de charcuterie, en est l’exemple le mieux documenté(1). Dans ses recommandations(2), le Fonds Mondial de Recherche contre le Cancer attire justement l’attention sur le fait que les études portant sur ce sujet, révèlent que les grands consommateurs de viande rouge mangent généralement moins d’aliments d’origine végétale. Ils bénéficient donc moins de leurs propriétés protectrices contre le cancer. Mais est-ce pour autant la panacée?
Quelles protéines dans nos assiettes?
En février 2012, l’EFSA a vérifié quelles étaient les principales sources de protéines dans l’alimentation des Européens. Leurs observations répertorient, par ordre d’importance, la viande et ses produits dérivés, suivis par les céréales/produits à base de céréales, ainsi que le lait et les produits laitiers.
Chez nous, il ressort de l’enquête de consommation belge de 2004 que la viande et les produits de viande représentent 36.5% de l’apport en protéines. Pour le reste, l’apport en protéines vient surtout des céréales et des produits céréaliers (19%), des produits laitiers (17.9%), des produits de la mer (6%) et des pommes de terre (3.7%).
Les légumes secs quant à eux sont largement oubliés, avec à peine 0.19% de la ration, soit un peu moins que les produits à base de soja (0.24%). Le Belge a donc tendance à peu combiner les sources de protéines animales et végétales, puisque les premières représentent grosso modo 65% des apports totaux (en ajoutant les œufs, notamment).
Faut-il stigmatiser viandes et produits laitiers?
Combiner protéines végétales et animales est certes souhaitable, mais aucune étude ne démontre l’intérêt du rapport «parfaitement» équilibré entre les deux sources(3). Une autre approche, probablement plus nuancée et positive, consisterait à promouvoir davantage une consommation plus importante de végétaux, tels que les produits céréaliers et les légumineuses.
Un bel exemple illustrant ce mode alimentaire est celui de l’alimentation du nord-ouest de la péninsule ibérique, singulièrement en Galice et au Portugal. L’alimentation traditionnelle dans cette région, plus connue sous l’intitulé Southern European Atlantic Diet (SEAD)(4), s’éloigne quelque peu du modèle méditerranéen. En raison de la situation géographique et du climat, ses habitants consomment des quantités importantes de poisson (surtout du cabillaud frais ou salé et séché), de viande (viande rouge et porc) et de produits laitiers. L’huile d’olive n’est pas la première source de matière grasse, et les fruits et noix sont relativement absents.
Le Belge a tendance à peu combiner les sources de protéines, celles d’origine animale représentant environ 65% des apports totaux.
A l’instar de l’alimentation méditerranéenne, la consommation de vin rouge et de végétaux (légumes frais, légumineuses, pommes de terre et produits céréaliers) est, en revanche, très importante. Le pain complet accompagne, par exemple, tous les plats principaux et chacun d’eux est accompagné d’une soupe en entrée. Or, plusieurs études soulignent les bénéfices de ce régime alimentaire, notamment pour le cœur.
Moins d’infarctus au Portugal
Avec des taux de mortalité cardiaque d’origine ischémique respectivement de 30.6/100.000 et 69/100.000, Portugais et Galiciens figurent parmi les meilleurs élèves européens en la matière(4). De nombreux travaux ont étudié le modèle SEAD et une étude récente(5) décrypte en partie les mécanismes cardio-protecteurs.
Conduite entre 2008 et 2010, elle comportait 10.231 individus de 18 ans et plus. L’adhérence au modèle SEAD était mesurée selon un score de 0 à 9 (9 étant l’inclusion des 9 composants principaux de la SEAD). En comparaison des individus qui suivaient le moins cette alimentation, l’adhérence la plus élevée au SEAD est associée à des concentrations significativement plus faibles de certains marqueurs de l’inflammation comme la CRP, ainsi qu’à des concentrations plus basses en triglycérides plasmatiques, à des taux d’insuline et une insulinorésistance plus faibles, et à une pression artérielle systolique plus basse.
Des résultats qui, s’ils posent question sur la nature des mécanismes et nutriments impliqués, montrent qu’on a le droit de ne pas vouloir manger de viande, et d’essayer de convaincre ses semblables d’en faire autant! Mais, à l’opposé, un certain nombre d’arguments ne résistent pas à une réflexion pondérée sur le sujet.