Les analogues du GLP-1 étaient au menu de la journée annuelle des diététiciens francophones, l’UPDLF. Très efficaces au départ, ces traitements soulèvent toutefois de nombreuses questions, y compris d’un point de vue éthique…
La 22e Journée annuelle des diététicien·ne·s, qui a fait salle comble, était placée sous le thème de l’innovation en santé. Et en matière d’innovation, les nouvelles classes de médicaments qui agissent sur les incrétines, dont les analogues du GLP-1 ou agonistes des récepteurs au GLP-1, modifient sensiblement la prise en charge du diabète de type 2 et de l’excès de poids et de l’obésité. Dans son exposé consacré au sujet, le Pr Em. Jean-Paul Thissen rapporte qu’outre une réduction des apports caloriques d’environ 1/3, ces médicaments entraînent des modifications du comportement alimentaire, avec un attrait plus marqué pour les fruits, les légumes, la volaille, le poisson, et moins marqué pour les snacks salés et les sodas sucrés.
De nombreuses autres molécules sont dans le pipeline : dualistes (qui agissent aussi sur le GIP), triagonistes (dont l’action porte en plus sur le récepteur du glucagon), et des formes qui ne se limitent plus aux injections, mais qui pourront être prises par la bouche.
À lire aussi : Intestin : une différence homme-femme fondamentale ?
Analogues GLP1 : efficacité sans précédent sur l’obésité
« C’est la première fois que nous disposons de médicaments aussi efficaces, avec un tel profil de sécurité », se réjouit J-P Thissen. En moyenne, on observe une perte de poids de 15 % en 6 semaines. Mais ce n’est pas tout : il y a aussi une réduction des comorbidités telles que le prédiabète, les problèmes cardiaques, la MASLD…
Du côté des effets secondaires, ils sont surtout d’ordre digestif (nausées, vomissements, diarrhées, constipation…). Les effets neuropsychiatriques avancés auraient été infirmés. Mais ce qui préoccupe le plus le Pr Thissen, c’est le risque accru de neuropathie optique ischémique qui, bien qu’excessivement rare, peut conduire à la perte de vue d’un œil.
Parmi les préoccupations à plus long terme, il cite le maintien de la masse maigre. D’où l’importance des protéines, et, de manière plus générale, une alimentation équilibrée pour accompagner ce type de traitement. L’activité physique est aussi essentielle pour limiter la reprise du poids qui survient inéluctablement au fil du temps…
À lire aussi : Ultra-transformé ou pas : le végétal fait perdre du poids
Santé métabolique, santé mentale et éthique
Derrière cette efficacité inégalée, le Prof Thissen s’interroge sur le devenir de la prévention primaire de l’obésité, de l’adoption d’une alimentation saine, des risques de carences nutritionnelles… Et de préciser que l’obésité n’est pas un manque de GLP-1, et que les GLP-1 ne guérissent donc pas l’obésité. D’ailleurs, ces médicaments pourraient aussi avoir un effet sur la sécrétion de ces incrétines, dont on peut envisager que la sécrétion endogène s’amenuise sous l’effet d’une telle médication. À suivre…
L’efficacité clinique et métabolique n’est pas la seule dimension à prendre en compte… Florian Saffer, Diététicien thérapeute, a abordé l’aspect éthique dans le métier de diététicien, au travers d’un grand nombre de questions, ou plutôt d’interrogations. Comme celle de savoir si agir sur certains paramètres que l’on cherche à améliorer à tout prix (glycémie, poids…) tout en altérant la santé mentale des patients relève réellement du soin.
Pendant longtemps, la prise en charge de l’obésité a été réduite à une logique thermodynamique. Mais est-ce que cette logique s’applique à des systèmes complexes ? Poser la question, c’est y répondre, puisqu’on sait aujourd’hui que les régimes augmentent la probabilité de prendre du poids… Il est donc nécessaire d’aborder l’obésité de manière pluridisciplinaire, y compris lors de traitement aux analogues du GLP-1. Le comportementaliste relève que la moitié des patients traités avec ces nouveaux médicaments abandonnent le traitement après 2 ans. Pourquoi ? Parce qu’ils éprouvent moins de plaisir à manger, parce qu’ils trouvent la vie ennuyeuse. Il va falloir intégrer cela dans l’équation du bénéfice-risque…
À lire aussi : Comportements obésogènes et santé mentale étroitement liés
Source
22e Journée d’étude de l’UPDLF. Charleroi, 3 octobre 2025.