Selon les estimations, une personne sur dix a déjà souffert de calculs rénaux, ce qui en fait la deuxième affection la plus fréquente (après les caries dentaires). Fait inquiétant: de plus en plus de personnes en sont victimes. Environ une personne sur mille doit être admise à l’hôpital chaque année à cause de calculs rénaux, et le risque de rechute s’élève à 15% après un an. En Belgique, 500.000 à 600.000 personnes souffrent plusieurs fois de lithiase. Le Dr Simon van Hooland, néphrologue à l’AZ St-Lucas (Gand) nous explique le problème et son traitement, aux côtés de son bras droit, la diététicienne Maggy Van Herreweghe.
Plusieurs causes peuvent être à l’origine de la formation de calculs rénaux: facteurs génétiques, infections, certains médicaments, troubles hormonaux ou anomalies anatomiques. Les calculs rénaux surviennent généralement à la suite d’une perturbation de l’équilibre, entre les substances qui favorisent la formation de cristaux dans l’urine et celles qui la freinent. Ce déséquilibre provoque une sursaturation de l’urine en certains éléments, ce qui engendre la formation de cristaux. À partir du moment où un premier noyau de cristal s’est formé, de plus en plus de matières peuvent s’y accrocher jusqu’à former un sédiment dur dans les voies urinaires.
Parmi les substances qui favorisent l’apparition de cristaux dans les urines, on peut citer le calcium, l’oxalate, le phosphate et l’acide urique, produit final du métabolisme des purines. Ces substances sont naturellement présentes dans les urines, mais ce sont des concentrations trop élevées qui peuvent engendrer la formation de calculs rénaux. Une acidité anormale des urines (pH trop bas ou trop élevé) peut également en être la cause.
Un important ralentisseur de la formation de calculs rénaux est le citrate, une petite molécule organique (créée par le métabolisme du glucose), qui sert de source d’énergie aux cellules de notre corps. La citraturie peut être influencée par l’alimentation (les kiwis et les agrumes, par exemple, sont très riches en citrate).
Les calculs rénaux sont répartis dans différentes classes, en fonction de leur composition. Au total, il en existe six, mais elles sont encore divisées en sous-classes.
Les kiwis et les agrumes sont particulièrement riches en citrate, un important ralentisseur de la formation de calculs rénaux.
Conséquences d’un changement des habitudes alimentaires
La fréquence globale de la lithiase a surtout explosé après la Seconde Guerre mondiale, lorsque les conditions de vie se sont améliorées et que les habitudes alimentaires ont fortement changé. Le dr van Hooland fait référence à une étude britannique qui montre que les Européens consomment, à l’heure actuelle, trois fois plus de sel, cinq fois plus de protéines animales et vingt fois plus de sucres raffinés qu’à la fin du 19ème siècle.
Ces chiffres ne sont pas difficiles à comprendre lorsqu’on examine le modèle alimentaire du consommateur occidental moyen: consommation fréquente de repas préparés, fastfood et boissons rafraîchissantes avec généralement peu de légumes ou autres aliments végétaux.
Les changements d’habitudes alimentaires ont fait tripler la fréquence des calculs rénaux en Occident. Les calculs à base d’oxalate de calcium représentent aujourd’hui 60 à 75% des lithiases dans les pays occidentaux. Ce chiffre semble se stabiliser depuis ces 20 dernières années. Par contre, la lithiase urique augmente, parallèlement à la pandémie d’obésité et de diabète.
Bon nombre de patients ne se rendent compte de la présence d’un calcul que lorsque celui-ci bloque le canal urinaire.
Traitement et prévention
Bon nombre de patients ne se rendent compte de la présence d’un calcul, que lorsque celui-ci bloque le canal urinaire. Il est possible que le calcul s’élimine de lui-même si la personne boit beaucoup, mais dans de nombreux cas, le blocage entraîne des coliques néphrétiques. Un blocage de l’écoulement de l’urine empêche le bon fonctionnement des reins, ce qui peut provoquer leur endommagement, surtout en cas de rechute, voire une insuffisance rénale chronique. Il ne faut donc pas sous-estimer l’importance de la prévention des calculs rénaux. De plus, celle-ci épargnera au patient des douleurs aiguës.
Voici un aperçu non exhaustif des tâches des trois acteurs principaux qui accompagnent le patient souffrant de calculs rénaux. Pour le traitement, le Dr van Hooland insiste fortement sur le bilan métabolique, et plus particulièrement sur l’analyse morphologique des calculs rénaux, réalisée dans l’un des deux laboratoires spécialisés de Belgique.
Le calcul y est analysé au niveau morphologique, ainsi que par une spectroscopie infrarouge. Les résultats de cette analyse permettent de déterminer un traitement adapté et réussi du patient.
Un apport normal de 800 à 1000 mg de calcium par jour sera, par exemple, recommandé aux personnes souffrant de calculs rénaux à base d’oxalate de calcium. Étant donné le paradoxe lié au calcium (voir le tableau de l’influence des habitudes alimentaires), celui-ci n’est pas banni.
En fonction de la classe spécifique à laquelle appartient le calcul, le calcium ou l’oxalate constitueront un point d’attention dans le régime alimentaire. En général, il sera conseillé de:
- viser un IMC sain (< 25 kg/m²)
- boire suffisamment, c’est-à-dire 2,5 à 3 litres répartis sur toute la journée, y compris avant d’aller se coucher (afin d’éviter une concentration trop importante des urines). Il est surtout recommandé de consommer de l’eau. Il vaut mieux éviter l’alcool ainsi que les boissons riches en calories et en phosphore (telles que les boissons rafraîchissantes), qui peuvent aussi être riches en fructose.
- manger sainement: consommer des protéines à raison de 1 g/kg de poids/jour (en alternant les sources animales et végétales), limiter les graisses saturées (10%) et trans (1%), consommer des fibres (30 à 40 g par jour) présentes dans les légumes et les fruits, qui sont également riches en citrates, et limiter le sodium (2 000 à 3 000 mg/jour).
L’alimentation peut jouer un rôle préventif
Il apparaît clairement que l’alimentation influence fortement la formation éventuelle de calculs rénaux. Le traitement basé sur l’analyse de laboratoire spécifique permet de prodiguer des conseils individuels ciblés. Généralement, le traitement exige du patient un changement durable dans ses habitudes alimentaires, ce qui pose souvent problème. Un suivi régulier dans une clinique spécialisée ou par un diététicien spécialisé peut offrir au patient l’accompagnement nécessaire afin d’éviter des complications.