Des chercheurs américains ont réalisé une analyse systématique pour étudier le lien entre les micronutriments du lait maternel, la croissance et la composition corporelle des enfants de moins de 2 ans. Conclusions ? Bien plus de recherches qualitatives sont nécessaires sur ce sujet.
Le lait maternel est riche en nutriments et composants bioactifs (hormones et anticorps) qui favorisent le développement des jeunes enfants. Or, leur concentration varie d’une mère à l’autre, en fonction des repas quotidiens et tout au long de la période d’allaitement. On ignore encore leur incidence sur la croissance des enfants.
Des chercheurs américains ont voulu y remédier : entre 1980 et 2022, ils ont étudié les liens entre les composants macro-, micro- et bioactifs, d’une part, et l’anthropométrie d’enfants en bonne santé nés à terme et âgés de moins de deux ans, d’autre part. Nous avons pris connaissance des résultats concernant les micronutriments dans une analyse systématique récemment publiée dans la revue Advances in Nutrition de l’American Society for Nutrition.
28 articles sur l’échelle scientifique
Pour cette analyse systématique, les chercheurs ont consulté 9992 résumés d’essais contrôlés randomisés ou d’études d’observation dans les bases de données scientifiques les plus connues et ont examiné 1001 articles, pour en retenir 141. Parmi ceux-ci, 28 articles établissaient un lien entre les micronutriments du lait maternel de 2526 mères et l’anthropométrie de leurs bébés, le plus souvent n’allant pas au-delà de 6 mois.
Les chercheurs ont été étonnés par le nombre limité d’études et le suivi à très court terme des enfants. L’OMS recommande l’allaitement maternel jusqu’à l’âge de 2 ans au moins. Lorsque la mère présente de graves carences en zinc, en fer, en vitamine A ou en vitamine B12, cela peut nuire à la croissance de l’enfant.
Les chercheurs ont aussi développé une échelle d’évaluation pour les 28 articles. Ainsi, les études mentionnant si le bébé a été exclusivement allaité ou non, si l’anthropométrie a été effectuée par une personne formée ou si le lait maternel a fait l’objet d’une analyse de qualité, ont obtenu plus de points et donc une meilleure évaluation. 79 % des articles étudiés étaient de qualité moyenne ; seuls 25 % des articles ont obtenu une excellente note.
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Incidence des micronutriments du lait maternel sur la croissance au cours des 2 premières années ?
Plusieurs liens positifs ont été mis en évidence par les chercheurs :
- 2 études ont révélé un lien positif entre la concentration d’iode dans le lait au cours des 2 premières semaines et la courbe poids/taille (Z-score). Ce lien n’apparaît dans aucune autre étude.
- Au Guatemala, un lien positif entre la concentration de manganèse et la courbe poids/âge (Z-score également) a été observé chez 114 mères et enfants. Ce lien n’a pas été observé dans les pays à revenu plus élevé.
- Le zinc est le micronutriment le plus analysé (15 études). Selon les chercheurs, il existe un lien positif entre l’apport en zinc du lait maternel et le poids des bébés (à un âge précoce et surtout lorsque la mère présente un bon état nutritionnel) et la taille des enfants (surtout à un âge plus avancé).
- L’apport en calcium chez le nourrisson semble être un facteur prédictif du gain de taille entre 6 et 12 mois, surtout dans les pays touchés par la malnutrition.
Toutefois, en raison du nombre limité de données et de la qualité souvent insuffisante des articles examinés, ces liens restent flous. Seuls 10 des articles examinés font état de l’apport estimé de vitamines et de minéraux provenant du lait maternel. Les autres recherches portent uniquement sur les concentrations de micronutriments dans le lait maternel, mais cela ne constitue pas un aussi bon indicateur de la croissance de l’enfant. En outre, aucun protocole de collecte du lait maternel n’a été mis en place. A titre d’exemple, la teneur totale en lipides et la concentration en vitamines liposolubles varient entre le début et la fin d’une tétée.
Des recherches qualitatives plus approfondies sont nécessaires
Mais l’absence de liens explicables entre les micronutriments présents dans le lait maternel et la croissance des jeunes enfants n’exclut pas pour autant l’existence de liens évidents. Les études de cas montrent qu’un faible taux de vitamine B12 chez la mère peut entraîner une moins bonne croissance chez l’enfant. Pourtant, aucun lien n’a été trouvé dans les articles examinés dans le cadre de l’analyse systématique.
Les chercheurs concluent donc en appelant à davantage de recherche fondamentale sur la composition du lait maternel, la croissance, l’anthropométrie et l’état nutritionnel des enfants.
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Références
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Sarah M. Reyes and others, Human Milk Micronutrients and Child Growth and Body Composition in the First 2 y: A Systematic Review, Advances in Nutrition, 2023, ISSN 2161-8313, https://doi.org/10.1016/j.advnut.2023.06.005
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D.K. Dror and others, Effect of vitamin B12 deficiency on 42 neurodevelopment in infants: current knowledge and possible 43 mechanisms, Nutr. Rev. 66 (5) (2008) 250–255.