Un environnement alimentaire sain favorise des choix alimentaires bons pour la santé. Comment nos gouvernements y contribuent-ils via la législation et la réglementation ? Une étude internationale, à laquelle Sciensano a également collaboré, examine à la loupe la politique alimentaire de 11 pays européens.
Dans tous les pays européens, l’offre d’aliments ultra-transformés est actuellement largement supérieure à celle d’aliments peu transformés, non-transformés ou frais. Les choix alimentaires moins sains s’imposent donc souvent, par facilité. Pourtant, les gouvernements peuvent rendre l’alimentation équilibrée plus attrayante et plus accessible en mettant en place des politiques alimentaires judicieuses. Mais où en est la politique alimentaire en Europe ? Que font les différents pays dans ce domaine et quelles sont les lacunes ? Une récente étude européenne publiée dans The Lancet Regional Health – Europe, répond à ces questions et formule des propositions pour changer la donne.
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Environnements alimentaires sains : La Finlande, meilleur élève
L’étude Food-EPI associe deux projets de recherche européens : le projet STOP (Science & Technology in childhood Obesity Policy) et le projet PEN (Policy Evaluation Network). Les chercheurs ont ainsi évalué les politiques alimentaires de 11 pays européens (Allemagne, Espagne, Estonie, Finlande, Irlande, Italie, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal et Slovénie) menées entre 2019 et 2022. A cet effet, ils ont mis au point l’indice Food-EPI (Healthy Food Environment Policy Index), qui se compose de 50 indicateurs de bonnes pratiques pour une politique alimentaire saine. Pour chacun de ces indicateurs, les experts ont évalué le nombre de mesures en vigueur dans un pays : quasi aucune/aucune, peu, nombre moyen ou beaucoup.
Les résultats ? L’étude révèle que de tous les pays analysés, la Finlande est celui qui compte le plus grand nombre de mesures en faveur d’un environnement alimentaire sain. La Norvège et le Portugal s’en sortent également bien, contrairement aux autres pays européens. La Slovénie et la Pologne affichent ainsi les pourcentages les plus élevés, en termes d’absence partielle ou totale de politique, mais les Pays-Bas, l’Allemagne et l’Espagne ratent aussi bon nombre d’opportunités.
Il est intéressant de noter que tous les pays affichent des scores plus élevés pour les mesures et interventions qui soutiennent l’infrastructure (comme le leadership, le budget et le suivi des facteurs de risque des maladies non transmissibles, entre autres) que pour les domaines et mesures de politique proprement dits (notamment la composition nutritionnelle, l’étiquetage, la promotion et les prix) dans tous les pays.
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Une to-do-list sur mesure, pour chaque pays
Quelles sont les possibilités d’amélioration ? Tous les pays examinés dans le cadre de cette étude doivent vraiment faire des progrès en ce qui concerne les mesures en lien avec l’offre d’aliments sains (par exemple dans les écoles), la promotion de l’alimentation saine (qui inclut la limitation de la publicité pour les aliments mauvais pour la santé s’adressant aux enfants), la vente au détail (comme une réglementation applicable aux commerces de détail relative à l’offre d’aliments sains), le financement, le suivi et la prise en compte de la santé publique dans tous les domaines de politique.
Les chercheurs formulent également un certain nombre de recommandations destinées aux autorités nationales de tous les pays couverts par l’étude, les interventions et mesures les plus urgentes étant les suivantes :
- introduction de normes limitant la teneur en sel, en graisses saturées et en sucres ajoutés des aliments transformés ;
- amélioration de l’environnement alimentaire dans les écoles et aux abords de celles-ci ;
- subventions pour les fruits et légumes ;
- interdiction de la publicité pour les aliments mauvais pour la santé s’adressant aux enfants et jeunes de moins de 18 ans ;
- taxes supplémentaires sur les aliments et les boissons mauvais pour la santé ;
Les chercheurs insistent sur l’importance fondamentale du suivi de la bonne application des mesures. Des études futures peuvent y contribuer, par exemple en améliorant la compréhension des raisons à l’origine de la non-introduction de certaines mesures.
Où en est la politique alimentaire en Belgique ?
Sciensano, notre institution fédérale de recherche, va également appliquer le Food-EPI à la Belgique, en y ajoutant l’élément « durabilité ». Dans notre pays, le système alimentaire est en effet responsable de 20 % des émissions totales de gaz à effet de serre, dont 10 % pour la production agricole.
Dès cette année, via le projet de recherche SUSFOODBEL, Stefanie Vandevijvere – qui a également collaboré à l’étude Food-EPI – évaluera dans quelle mesure la politique de nos autorités fédérales et régionales contribue à des régimes alimentaires sains par le biais de systèmes alimentaires durables et où se situent les principales opportunités d’optimalisation de la politique alimentaire. Nous ne manquerons pas de vous tenir informés !
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Référence : Pineda E. et al, The Lancet Regional Health – Europe, Volume 23, décembre 2022, Décembre 2022, 100522.