Dysosmobacter welbionis, soit la bactérie qui pue, c’est le nom donné à cette nouvelle bactérie intestinale découverte par une équipe d’UCLouvain, et qui semble dotée d’un haut potentiel, notamment dans le diabète de type 2, l’obésité et l’inflammation.
À l’instar des aventuriers qui, depuis des siècles, arpentent la jungle pour découvrir des principes actifs et développer la pharmacopée, cela fait quelques petites décennies que les scientifiques explorent le microbiote intestinal pour en recenser sa population, établir des associations entre certaines espèces et la santé, et étudier le potentiel santé de certaines souches. À ce jour, on estime que 70% des bactéries du microbiote intestinal n’ont pas encore été identifiées. Une équipe de UCLouvain vient de découvrir une bactérie d’un genre nouveau, à qui elle a du coup pu donner un nom: Dysosmobacter welbionis, soit la bactérie qui pue (du grec Dysosmo = qui sent mauvais, parce qu’elle dégage une certaine odeur en culture), et welbionis pour le WELBIO, l’organisme de la Région wallonne qui finance cette recherche.
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Dans le microbiote de 70% de la population
Sur base de l’analyse de près de 12.000 échantillons provenant du monde entier, Patrice Cani, chercheur FNRS au Louvain Drug Research Institute de l’UCLouvain, et son équipe ont observé que ladite bactérie était présente chez pratiquement 70% de la population, ce qui est énorme. Mais surtout, ils ont constaté que cette bactérie, qui produit du butyrate, est moins présente chez les personnes diabétiques de type 2. En testant Dysosmobacter sur l’organisme de la souris, l’équipe de l’UCLouvain a pu observer des effets très intéressants pour les personnes diabétiques de type 2 et obèses, à savoir que la bactérie:
- Augmente le nombre de mitochondries dans le tissu adipeux brun et donc la thermogénèse non frissonnante (effet «brûle-graisse»)
- Diminue la glycémie et le poids
- Exerce un effet anti-inflammatoire
Ces effets ne sont pas sans rappeler ceux d’une autre bactérie au cœur des recherches du laboratoire de Patrice Cani: Akkermansia.
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Des effets au-delà de l’intestin
Autre constat mené par l’équipe, les effets de la bactérie se prolongent au-delà de l’intestin. Des molécules produites par Dysosmobacter migrent dans le corps et agissent ailleurs. Ce qui pourrait expliquer les effets de la bactérie notamment sur le tissu gras. Ces effets systémiques permettent aussi d’envisager un éventuel impact sur d’autres maladies comme les inflammations et le cancer, ce qui est actuellement à l’étude par l’équipe.
Les chercheurs envisagent en outre de tester l’action de cette nouvelle bactérie couplée à Akkermansia, pour voir dans quelle mesure il y aurait une démultiplication des effets sur la santé. À noter que contrairement à Akkermansia, la pasteurisation de Dysosmobacter annihile ses effets santé.
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Le Roy T. et al., Gut 202; 0:1–10. doi:10.1136/gutjnl-2020-323778