L’alimentation durable est aujourd’hui une priorité dont les deux axes centraux sont la transition protéique et la lutte contre le gaspillage alimentaire. Quel est ici le rôle du diététicien ? Qu’est-ce qu’une alimentation saine et durable ? La journée d’étude sur l’alimentation durable (« Duurzaamheid ») organisée par la VBDV en collaboration avec la commission flamande Duurzaamheid a permis de faire le point sur ces questions.
Une transition vers une alimentation plus végétale, avec moins d’aliments d’origine animale, s’impose, c’est une évidence. Ce thème a fait l’objet de toutes les attentions lors de la journée d’études sur l’alimentation durable organisée par l’Association professionnelle flamande des diététiciens (VBVD). N’oublions pas que les enjeux vont au-delà du seul souci de la protection environnementale. Une alimentation durable doit aussi être saine. Une alimentation exclusivement végétale est donc tout sauf la solution.
Quelles sont vos priorités, en tant que diététicien ? Les catégories d’aliments suivantes sont à privilégier pour un maximum de bienfaits pour la santé. Il s’agit, par ordre d’importance, des céréales complètes, des légumes et des fruits, des légumineuses, des noix et des graines. Ces aliments d’origine végétale forment aussi la base d’une alimentation durable. Une opération win-win donc, pour notre santé comme pour celle de l’environnement. Consultez l’épi alimentaire qui résume les recommandations alimentaires pour un maximum de bienfaits pour la santé !
Faut-il définitivement renoncer à la viande ? Non, selon l’étude Eat-Lancet « Planetary Health Diet » (Alimentation, Planète et Santé). Les aliments d’origine animale ont encore leur place dans une alimentation durable, il faut juste en consommer moins et moins souvent.
La sécurité alimentaire est-elle menacée ?
Se dirige-t-on vers l’indépendance de la Flandre dans le domaine de l’alimentation ? Impossible, a affirmé Tessa Avermaete (KU Leuven) pendant la journée d’étude. La transition protéique s’impose, mais il convient de raison garder. Lorsqu’on examine la question de la durabilité des systèmes alimentaires, il y a lieu de tenir compte de différents aspects. Et si l’environnement et la planète doivent être protégés, il ne faut pas perdre de vue la santé de l’homme, le contexte et l’économie.
Le défi ? Faire en sorte que les 8 milliards d’habitants de notre planète aient accès à une alimentation saine, aujourd’hui et dans le futur. La sécurité alimentaire est-elle garantie ? Des études indiquent que la production alimentaire devra augmenter d’ici à 2050 pour que tout le monde puisse consommer suffisamment de calories, explique Tessa Avermaete. Heureusement, de nombreuses solutions existent pour améliorer la sécurité alimentaire. En effet, les terres ne font pas encore l’objet d’une utilisation optimale. L’élevage accapare par exemple un pourcentage trop important des surfaces (agricoles), nécessite de produire des aliments pour le bétail et émet trop de CO2. La production d’aliments d’origine végétale nécessite moins de terres, aussi bien à poids égal qu’en équivalents protéines et/ou calories (voir graphiques).
A lire : L’alimentation végane chez l’enfant : à déconseiller ou non ?
Comment remplacer judicieusement la viande ?
Les aliments d’origine végétale méritent d’être mis à l’honneur, mais il faut être attentif à leurs qualités nutritionnelles. Ariane Louwaege (Mosquito in the room) a une nouvelle fois insisté sur l’importance des légumineuses, qui ont tous les atouts pour remplacer la viande. Elle a ensuite passé en revue les avantages des noix et des graines, sources de protéines, d’acides oméga-3, de vitamines B et de minéraux divers. Et qu’en est-il des substituts de viande et de poisson ? Du point de vue de l’impact environnemental, il s’agit d’un choix plus judicieux. Mais il faudra aussi veiller à bien lire l’étiquette pour s’assurer de leur valeur nutritionnelle (voir tableau).
Critères de choix pour les substituts de viande et de poisson | |
Suffisamment de protéines | > 10 g/100 g |
Peu de graisses saturées | < 5 g/100 g |
Faible teneur en sel | < 1,6 g/100 g |
Teneur suffisante en fer | > 0,7 mg/100 g |
Comparés à leurs équivalents d’origine animale, les alternatives végétales aux produits laitiers seraient un choix plus judicieux du point de vue de l’environnement. Il faut toutefois être attentif à leur qualité nutritionnelle et privilégier les versions enrichies. Les choses sont moins simples en ce qui concerne les alternatives végétales au fromage, admet Ariane Louwaege. Les « faux fromages » contiennent en effet peu de protéines et trop de matières grasses (y compris des graisses saturées, vu la présence de graisse de coco par exemple).
Le saviez-vous ? Les boissons végétales ne sont pas reprises dans la catégorie « lait et produits laitiers » dans les recommandations alimentaires pour la population belge adulte (2019). Si la composition nutritionnelle de certaines boissons végétales enrichies se rapproche de celle de leurs variantes d’origine animale, leurs avantages pour la santé ne sont pas comparables.
Un tiers de la production alimentaire est tout simplement gaspillé
Impossible de penser alimentation durable sans s’attaquer au gaspillage alimentaire. Lors de la journée d’étude, Johanna Meuwissen (Foodwin) a ainsi rappelé qu’un tiers de la production alimentaire totale n’était pas consommée. Dans les hôpitaux, ce sont 240 g/personne/repas qui finissent dans les poubelles, et jusqu’à 270 g/personne/repas dans les maisons de repos et de soins, selon les données de Foodwin. L’Union européenne a calculé qu’environ 10 % du gaspillage alimentaire total en Europe est à mettre sur le compte de la date limite de consommation indiquée sur les emballages. Dans ce domaine également, le diététicien a un rôle important à jouer. Il peut en effet aider les patients ou les consommateurs à démêler le vrai du faux et leur fournir des conseils très simples pour lutter à leur niveau contre le gaspillage alimentaire.
Donner la priorité à l’alimentation durable est une tâche importante relevant des compétences des diététiciens. La journée d’étude, et en particulier la présentation de Lisa Thys (commissie duurzaamheid), a clairement insisté sur ce point. Alors qu’une tendance à la diminution de la consommation de viande et de poisson est déjà perceptible en Belgique, un grand nombre de consommateurs font aussi de la résistance. Reconnaître cette résistance, laisser la liberté de choix et proposer d’y aller progressivement est fondamental pour vaincre ces hésitations. Lisez aussi l’interview d’Evelien Mertens sur le rôle du diététicien dans l’alimentation durable. Evelien Mertens est membre de la commission flamande sur la durabilité, est chercheuse dans le domaine de la diététique et de la nutrition à la Erasmushogeschool Brussel et est diététicienne indépendante à titre complémentaire.