Le Conseil Supérieur de la Santé a organisé une conférence intitulée « Vers une enfance exempte de marketing alimentaire malsain ». Les orateurs s’accordent sur la nécessité de créer un cadre réglementaire pour protéger enfants et adolescents.
C‘est dans la foulée de son récent avis sur le marketing alimentaire auprès des enfants que le Conseil Supérieur de la Santé (CSS) a organisé sa journée annuelle sur ce même thème. C’est que le marketing alimentaire fait partie des facteurs qui contribuent à un environnement obésogène. Maria João Gregorio (Direction Générale santé, Portugal) rapporte qu’entre 4 à 17 ans, les enfants sont exposés à 1715 spots TV malsains par an et 183 promotions en ligne par semaine. Selon elle, il y aurait 4 fois plus de publicités pour des denrées malsaines que pour les autres.
Si la télévision reste le premier canal d’exposition pour les enfants, les autres canaux se multiplient, notamment par l’intermédiaire de smartphone, explique Liselot Hudders (Université de Gand). Celui-ci représente 96 % des expositions à la publicité pour les adolescents, et les enfants, qui acquièrent un smartphone de plus en plus tôt (l’âge est passé de 10 à 8 ans), sont déjà actifs sur YouTube et TikTok.
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Quels critères nutritionnels pour le marketing alimentaire ?
Les travaux ont montré une association entre le marketing pour des produits malsains et une augmentation des apports énergétiques et en nutriments problématiques (sucres, sel, acides gras saturés…), ainsi qu’une augmentation de l’excès de poids et de l’obésité, des maladies non transmissibles, et des coûts de soins de santé. Mais sur base de quels critères faudrait-il interdire la publicité pour certaines denrées auprès des enfants ?
Trois pistes existent actuellement :
- Les critères fixés par l’OMS
- Le Nutri-Score
- Les critères fixés par l’industrie (EU-Pledge et Belgian Pledge)
Hélène Alexiou (Haute École Vinci, Bruxelles) a comparé les 3 critères appliqués à différentes catégories d’aliments. Globalement, le verdict le plus sévère est obtenu avec les critères OMS : 75 % des céréales pour petit-déjeuner se verraient interdites de publicité, contre 23 % si l’on cible les produits avec un Nutri-Score D et E. 53 % des produits laitiers et 100 % des jus de fruits se verraient interdits de publicité avec les critères OMS, contre respectivement 3 % et 8 % avec un Nutri-Score D et E. Pour les critères du Pledge européen – qui sont appliqués par seulement une partie de l’industrie – , la diététicienne estime que la tolérance pour les sucres, le sel… est trop élevée. Même son de cloche pour Stefanie Vandevijvere (Sciensano), qui rappelle que le coût direct de l’obésité infantile s’élève à 3, 3 milliards par an, auquel il faut ajouter 1,2 milliard/an de coûts indirects (absentéisme…).
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Favoriser les comportements sains
Limiter le marketing alimentaire ne résoudra pas à lui seul le problème, de l’avis de nombreux des orateurs. Laurence Doughan (SPF Santé Publique) a exposé les techniques de nudging ou « coup de pouce » pour encourager la consommation d’aliments sains. Comme des abribus qui font la publicité pour des mandarines, des caddies qui valorisent les fruits et légumes.
Le Ministre de la Santé Franck Vandenbroucke, favorable à une réglementation limitant le marketing alimentaire malsain auprès des enfants, évoque aussi l’intérêt de favoriser le nudging pour valoriser les fruits et légumes, les légumineuses, les fruits à coques… et remplacer des denrées malsaines par des denrées saines à l’abord de caisses.
Reste à voir ce qui sera décidé, sur base de quels critères. À moins qu’une initiative européenne soit prise, ce qui aurait plus de sens que des mesures individuelles et différentes par pays…
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Référence :
Conférence du CSS le 5 décembre 2022, Résidence Palace, Bruxelles.