Réduire l’attention d’enfants en surpoids aux multiples stimuli qui peuvent entraîner une suralimentation, et ce en une seule session de formation, c’est ce que suggère cette étude publiée dans la revue Appetite.
Parmi les multiples facteurs environnementaux de l’obésité, figure en bonne place la réponse neuro-cognitive et comportementale aux signaux ou stimuli alimentaires. Le cerveau tend à espérer de la nourriture, des récompenses toujours plus importantes, ce qui conduit le sujet aux excès alimentaires malsains.
Alors que de nombreuses pistes figurent au menu de nombreux plans nationaux de lutte contre l’obésité, peu d’interventions ciblant ce réflexe de récompense n’ont encore été tentées ou étudiées. Pourtant, le fardeau de l’obésité s’alourdit toujours en prévalence avec 1/3 des enfants américains en surpoids ou obèses (16% des enfants français), que tous ces enfants sont définitivement à risque accru de maladies cardiovasculaires, de cancer, de troubles métaboliques et… de décès prématuré.
Le Prof. Kerri Boutelle, professeur de pédiatrie et de psychiatrie à l’Université de Californie à San Diego, et ses collègues ont testé une session unique de modification de l’attention, formant 24 enfants en surpoids ou obèses, âgés de 8 à 12 ans, à ignorer ces déclencheurs alimentaires, comme on peut le faire aussi pour l’anxiété ou la toxicomanie. Avec une seule session, ils parviennent à diminuer la suralimentation chez les enfants obèses.
Les auteurs nomment cette propension le biais attentionnel à l’alimentation, un état de sensibilité aux signaux alimentaires qui, au fil du temps, va évoluer en véritable dépendance alimentaire. Leur formation est dite ‘implicite’, c’est-à-dire que le participant ne réalise pas ce qui lui arrive. Elle est basée sur un «déconditionnement» ou une modification de l’attention.
Les enfants sont donc invités à observer des paires de mots qui clignotent rapidement sur un écran d’ordinateur. L’un des mots est à caractère alimentaire, comme «sucrerie», l’autre non. Une lettre apparaît ensuite à l’écran à la place du mot alimentaire ou du mot non-alimentaire et l’enfant doit appuyer immédiatement sur le bouton droit ou gauche associé à l’emplacement de la lettre.
Résultat: un groupe voyait la lettre s’afficher dans 50% des cas du côté du mot alimentaire et dans 50% des cas du côté du groupe non-alimentaire. Et un groupe voyait la lettre s’afficher toujours du côté du mot non-alimentaire.
Après une seule séance, les enfants du second groupe accordent moins d’attention aux mots à caractère alimentaire. L’évaluation portait sur l’alimentation en l’absence de session et sur la soif, le goût et la salivation. Alors que les enfants du premier groupe montrent une augmentation significative de leur apport calorique, c’est une diminution qui est constatée chez les enfants du second groupe. L’étude est ainsi la première à suggérer l’efficacité d’un tel programme pour influencer le régime alimentaire chez les enfants obèses.
Certes des études plus larges sont nécessaires pour préciser le principe de ces formations, mais cette expérience laisse déjà imaginer une nouvelle voie pour lutter contre l’obésité infantile. Les auteurs imaginent déjà un jeu d’ordinateur destiné à améliorer la capacité des enfants à suivre un régime alimentaire, en diminuant leur attention à l’alimentation.
Kerri N. Boutelle et al., Appetite, 08/02/2014.