L’obésité représente un coût titanesque pour les systèmes de santé mondiaux, mais également un coût écologique important pour l’environnement. En effet, le surpoids participe indirectement au gaspillage alimentaire. Et pas qu’un peu!
Selon la FAO, les pays riches jettent presque autant de nourriture à la poubelle que la totalité de la production nette de l’Afrique subsaharienne, soit environ 230 millions de tonnes de déchets par an. La suralimentation n’est-elle pas tout autant une forme de gaspillage alimentaire? Ce postulat est émis par des chercheurs italiens.
Leur étude montre que l’obésité aurait une empreinte écologique désastreuse… et insoupçonnée. Au centre des repas, les fruits, les légumes, les racines et les tubercules ont les taux de déchets directs les plus élevés. Cependant, la consommation excessive d’énergie est principalement dominée par les produits alimentaires les plus denses en calories. Or, ces catégories d’aliments mobilisent généralement plus de ressources en termes de terres, d’eau et de gaz à effet de serre au cours de leur production.
Le gaspillage alimentaire direct est un feu de paille face à l’obésité
Les scientifiques italiens ont proposé une méthode de calcul originale de l’impact écologique du gaspillage alimentaire mondial lié à la suralimentation. Premièrement, ils ont estimé le poids corporel net en excès de la population de chaque pays, sur la base de données relatives à l’IMC et à la taille. Ils ont ensuite extrapolé les apports énergétiques excédentaires de la nourriture responsable du surpoids et de l’obésité pour définir ce qu’ils ont appelé un «gaspillage alimentaire métabolique». Cette démarche donne un instantané des excès alimentaires accumulés par la population mondiale actuelle, et non un taux de surconsommation.
Verdict: selon leurs estimations, le surpoids à l’échelle mondiale correspondrait à environ 140 milliards de tonnes de déchets alimentaires dans le monde. À titre de comparaison, le gaspillage alimentaire direct annuel est estimé à 1,3 milliard de tonnes par an. Il serait donc 107 fois moins important! Et ce n’est pas tout…
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L’Europe, les USA et l’Océanie au flop du gaspillage alimentaire
L’impact disproportionné de ce nouvel index théorique s’accentue encore lorsque ses coûts écologiques sont calculés en intégrant notamment l’empreinte carbone. Sans surprise, les résultats indiquent que les aliments les plus denses en énergie génèrent l’impact écologique le plus élevé. Ainsi, le gaspillage alimentaire métabolique mondial génèrerait à lui seul l’équivalent de 240 milliards de tonnes de CO2, soit ce que représente les combustions fossiles liées à l’activité humaine cumulée des 7 dernières années! Un triste gâchis pour lequel l’Union européenne, l’Amérique du Nord et l’Océanie contribuent ensemble autant que le reste du monde, avec la viande, les œufs et le lait représentant près de 75% de ce chiffre.
Bien que reposant sur des données publiques recueillies par la FAO, l’OMS, le WWF et le BCFN – un groupe de réflexion sur la nutrition soutenu par l’UE -, cette approche est semée d’incertitudes méthodologiques et conceptuelles. Elle a le cependant le mérite d’attirer l’attention sur les conséquences potentielles de consommation excessive de calories pour la santé de la planète.
Gaspillage alimentaire et développement durable sont intimement liés
On savait déjà que certains choix alimentaires nécessitent l’utilisation de davantage de terres et d’eau et causent plus d’émissions de gaz à effet de serre que d’autres. Cette étude montre pour la première fois que ces familles alimentaires sont davantage plébiscitées par les personnes en surpoids et en obésité. L’enjeu de la prévention de l’obésité pourrait donc être double! D’une part, la réduction des facteurs de risque et de comorbidité associés à la maladie. Et d’autre part, un moindre épuisement des ressources naturelles de notre environnement et une meilleure adaptation au changement climatique. Dernier corolaire important: lutter contre l’obésité et le gaspillage alimentaire métabolique peut également être une action qui contribue à réduire la faim dans le monde.
Moins de calories, moins de gaspillage alimentaire, moins de protéines animales, plus d’aliments végétaux, en d’autres mots, consommer autrement, c’est aussi une priorité pour arriver à nourrir sainement l’humanité en 2050, selon la Commission EAT-Lancet. Mais il n’est pas nécessaire pour autant de consommer vegan ni même de devenir végétarien…
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Me voilà mitigée entre l’intérêt de l’étude et la peur qu’une personne en surpoids ne comble ses compulsions émotionnelles avec un tel titre ! « Trop manger » pollue ou « être mal au point de devoir combler ses émotions » pollue ? N’allons pas taper sur les personnes en surpoids !